Lee van Dovski
Docteur-ès-lettres.
66, Rue du Rhône.
G e n è v e.
Genève, le 28 Février [19]51.
Messieurs
G. Ricordi & C.
Editori
Via Berchet 2.
M i l a n o
Par la présente je vous remercie bien pour votre aimable lettre du 29 Janvier et pour toutes les infomations précieuses qui me seront très utiles.
Je me suis occupé longuement avec la pensée de faire revivre un des opéras de Puccini moins connus. J’ai pris connaissance de votre opinion que vous ne croyez pas que le moment serait opportun pour ça. Quant à moi je n’ai pas changé d’opinion sur ce point. Je suis convaincu que le public est vraiment las de devoir écouter chaque jour de la musique atonale - qui n’est pas de musique au sens classique de ce môt. Les trois éléments de la musique sont suivant la définition classique: la mélodie, la harmonie et le rhythme [sic]. Dans la musique atonale la mélodie et l’harmonie manquent. C’est pourquoi le public a recu avec un vrai enthousiasme les opéras du jeune Verdi qu’on a vu et écouté à l’occasion du centenaire du maître. On a joué Nabucco, Luisa Miller et tant d’autres. J’ai vu pleurer le public en écoutant “Va pensiero...” parce que le public sait qu’on a chanté cet air au moment de l’enterrement du maître. On ne regarde pas que c’est écrit en 3/4 comme une sorte de valse qui se ne prête pas pour des pauvres réfugiés loin de leur patrie. On est enthousiaste de la belle mélodie, on veut la écouter pour la deuxième, même pour la troisième fois.
La même chose chez Bizet. Partout on joue “Les pêcheurs de perles”.
Pourquoi? Le texte est un peu ridicule. Mais – la musique est plaine de belles mélodies.
Alors je crois qu’une réadaptation d’Edgard [sic] par exemple serait très utile et pourrait remporter un très grand succès à l’occasion du centième anniversaire de Puccini en 1958.
Je vous fais la proposition suivante:
Envoyez-moi la partition d’Edgar (“Klavier-Auszüg mit Gesangstimmen extra”) et envoyez-moi le texte en traduction allemande du Dr. Popeika.
Après avoir étudié la partition je vous ferai une proposition pour une réadaptation avec un texte amélioré (le texte actuel étant mauvais suivant toutes les critiques que j’ai lues). Si ma réadaptation vous plaira, nous nous arrangerons – si non, les choses resteront au point actuel.
Faites-moi donc d’abord une facture pour la partition et le texte et dites-moi, combien de pages contient la lettre de Puccini dont vous me parlez dans votree lettre du 29 Janvier. Je vous enverrai un chèque pour le tout.
En vous remerciant d’avance je vous prie d’agréer, Messieurs, mes salutations empressées.