Paris 9 janv. 84
Mon cher éditeur.
J’ai reçu votre carte à Boulogne. Je vous fais parvenir la France du Nord[1]. Toute la presse française a parlé du succès du festival et de la fille de Saül.
J’espère que <vous> m’accorderez une place dans votre honorable Journal. Tâchez de mettre tout l’article ci-joint.
Je vous prie de jeter un coup d’œil sérieux sur mon ouvrage. Le succès de Boulogne aux deux concerts n’a pas été de commande.
J’étais au contraire dans une mauvaise situation : orchestre improvisé, chœurs d’amateurs – public nombreux mal préparé – Au 3ème morceau la glace était déjà rompue. Quatre bis.
Au second concert on a refusé 200 personnes – mêmes acclamations.
La ville de Dunkerque répétera fin février la même fête musicale avec 200 musiciens, Vergnet et Melle Nadaud[2].
Vous voyez que cela devient sérieux !
Je vise au théâtre naturellement. Pandolfini[3] qui connaît le grand rôle de Saül doit en parler au théâtre Italien ici Mais vous, mon cher éditeur, vous êtes plus puissant. Croyez-en mon expérience en matières musicales, tâchez de lire ma partition. Ce n’est pas pour vous la vendre ! – Je gagne de l’argent avec. Chose curieuse mes premiers 500 sont à peu près écoulés à 20 frs[4].
Je vous avoue que je suis très content.
Votre bien dévoué
Félix Godefroid
[1] Reproduit notamment dans Le ménestrel du 20 avril 1884.
[2] Le ténor Edmond Vergnet (1850-1904) et la soprano Jeanne Nadaud, de l’Opéra-Comique.
[3] Le baryton Francesco Pandolfini (Palerme, 1833 ou 36-Milan, 1916).
[4] tel est en effet le prix mentionné pour cette publication à compte d’auteur dans la Bibliographie de la France, 1883, p. 383, n° 2440.